Si la majorité des entreprises n°1 en Chine est encore très loin de leurs équivalents américains à l’international, ils sont leurs concurrents directs dans les années à venir. Leur grand potentiel et leur montée incessante en valeur boursière et en nombre d’utilisateurs font d’eux la première menace des géants de la Silicon Valley.
Preuve en est avec Tencent qui rivalise de près avec Facebook.
La Chine n’a pas besoin des outils américains.
Au-delà de la compétition boursière et commerciale entre les GAFA et les BATX, la concurrence entre les géants américains et les géants chinois incarne celle qui se déroule en filigrane entre la Chine et les États-Unis. La Silicon Valley, berceau de l’innovation technologique, a trouvé un rival à sa hauteur : la Chine, un pays qu’on ne cesse de qualifier d’émergent alors qu’il semble avoir bien émergé depuis des années, si bien qu’il représente aujourd’hui la menace technologique la plus concrète face aux États-Unis.
Un geste de l’état chinois révèle la réalité et l’ampleur de cette compétition : en 2009, la Chine bannit Facebook du pays, donnant ainsi l’espace nécessaire à Baidu de s’épanouir. Contrairement aux États-Unis et à l’Union Européenne qui cherche à restreindre le pouvoir des GAFA qui deviennent trop puissantes et abusives à leur goût, les BATX ne connaissent aucune restriction, bien au contraire. En effet, l’état chinois offre volontiers le marché national à la domination des BATX. Tout est mis en œuvre pour que ces colosses du net occupent l’espace de tout leur poids et toute leur puissance.
Si les BATX dominent le marché et le quotidien en Chine, leur présence est encore timide à l’international mais elle s’impose doucement. À travers la diaspora chinoise dans le monde, les géants numériques se propagent petit à petit dans les pays à travers le globe. En 2017 déjà, 20% des recherches dans le monde ont été faites sur le moteur de recherche chinois Baidu. Cette rivalité révèle l’ambition chinoise de s’étendre à travers les continents et de conquérir l’autre moitié du monde.
La Chine s’implante en Europe.
Au début de l’année 2021, Alibaba entame l’implantation de son premier entrepôt européen à Liège. Une construction pharaonique avec comme objectif final un espace de 380 000 m2 pour traiter les colis du géant de l’e-commerce chinois et améliorer les délais de livraison pour l’Europe. Si le gouvernement fédéral soutient le projet, de nombreux militants ont exprimé leur colère contre le modèle économique qu’incarne Alibaba (tout comme Amazon) et leur inquiétude quant aux conséquences environnementales d’une telle construction si excessive. L’Europe ne semble pas prête à accueillir les géants chinois.
Si Alibaba fonctionne selon la même philosophie qu’Amazon et reçoit donc la même réticence des militants, l’entreprise Xiaomi quant à elle propose un modèle aux antipodes de celui d’Apple. Le fabricant chinois a développé une stratégie très efficace pour gagner du terrain en Europe : une qualité satisfaisante à des prix cassés qui permet à Xiaomi de se développer efficacement sur le continent. Les premiers points de vente européens de la marque ont été implantés dès 2018 à Paris, à Londres, en Espagne, en Pologne, entre autres.
Mais Alibaba a plus d’un tour dans son sac et ses stratégies sont diverses. Sa plateforme Fliggy permet aux utilisateurs chinois de réserver un voyage, du billet d’avion à l’hôtel. De nombreuses entreprises internationales ont ainsi développé des partenariats avec la plateforme, notamment en France, dont AirFrance ou la SNCF. De plus, Alipay, le procédé de paiement proposé par Alibaba, a été adopté par les grands magasins de Paris, lieux très visités par les touristes chinois. Quant à l’Alicloud, numéro 4 dans le monde depuis 2019, il ouvre ses premiers date centers européens en 2016, à Francfort et à Londres. Au cours de la même année, Alicloud s’installe à Paris pour diriger les régions Benexlox, Europe du Sud et Israël. Les régions Europe, Moyen-Orient et Afrique sont quant à elles pilotées depuis Dubaï.
Quant à Tencent, c’est à travers une stratégie d’alliance et d’investissement à l’international que la marque a réussi à s’installer et se répandre sur les autres continents. En 2017, Tencent Music qui réunit trois plateformes de streaming musical aux 800 millions d’utilisateurs actifs collabore avec la plateforme de musique suédoise Spotify, première du marché occidental avec 345 millions d’utilisateurs et 155 millions au début de l’année 2021. Les deux alliés ont mis en place une prise de participation minoritaire mutuelle : des investissements pour faciliter la négociation avec les sociétés de production musicale et enrichir le catalogue des deux plateformes.
En outre, Tencent a développé une stratégie d’investissements dans les sociétés européennes très réussie faisant preuve d’une patience remarquable. De 2015 à 2020, 27 opérations sur 48 sont attribuées au colosse chinois. En 2017, Tencent achète de nouvelles actions du groupe Snap Inc. Jusqu’à posséder 12% de leur capital. Par ailleurs, le géant chinois semble particulièrement apprécier les entreprises françaises ; en 2018, il participe au capital d’Ubisoft, éditeur de jeux vidéo français ; en janvier 2020, c’est au tour des start-ups Lydia et Qonto.
Ce n’est peut-être qu’une question de temps…
Les stratégies des quatre colosses chinois sont nombreuses, créatives et abondantes. Les quatre entreprises ont plus d’une corde à leur arc et n’hésitent pas à développer des idées pertinentes et originales pour élargir leur présence hors de leur propre territoire. Si leur position en bourse est encore loin de leurs rivaux américains, leurs méthodes sont efficaces et leur influence de plus en plus en large. Les BATX ont également l’avantage d’être soutenu par leur état, contrairement aux GAFA qui semblent être persécutés par tous les pays occidentaux mis à part quelques exceptions comme le Danemark qui ne sauraient refuser une telle puissance financière.